Je vais bien, (presque) tout va bien. Et ce n'est même pas de l'auto-persuasion.
J'ai beau chercher, mais je ne trouve rien de négatif, sinon de la poussière à remuer. Les mêmes problèmes sont plus ou moins là depuis longtemps, mais ils s'atténuent avec le temps, et moi je cours, je m'en éloigne, je les fuis.

Je sais que tout n'est pas rose, et je sais à quel point tout est fragile, à quel point je suis fragile. Je sais que je perds mon sang-froid et que j'ai des accès de colère quand quelque chose ne fonctionne pas à ma convenance, quand je cherche un objet sans le trouver, ou pour d'autres futilités. Je sais que mes relations avec ma mère relèvent parfois de la thérapie de groupe. Je suis consciente de ma tendance à ressasser les mêmes histoires qui sont pourtant devenues insignifiantes pour mon entourage. Je me rends progressivement compte que j'ai du mal à accepter une partie de ce que je suis.

Mais je m'en contre-fiche royalement.

Ce qui compte, c'est que j'ai trouvé un équilibre. C'est un équilibre précaire, qui s'appuie presque uniquement sur mes amis, mais c'est un équilibre en or.
Tant qu'ils sont là, je peux bien faire la funambule, je peux bien jouer avec le feu, je peux chuter, je peux me consumer, tout ira bien. Je suis bien trop inaccessible à mes vieux démons. Je dois bien avouer que mes amis m'ont bien eue. Ils m'ont bien apprivoisée.
Ca fait beaucoup de "bien" pour une seule personne, mais c'est tout simplement que c'est le seul mot qui convient. Je vais bien. Pas "mieux" qu'une situation antérieure. J'ai dépassé le stade où je prenais le pire comme point de comparaison. J'ai dépassé mon année de 2nde, ou presque. Je vais bien, parce que c'est le cas, et non en comparaison aux moments où tout allait de travers.
Je ne me sens plus seule. Et je pense que c'est ce qui pouvait m'arriver de mieux.

Je cherche comment exprimer vraiment ce que je ressens depuis environ une demie-heure, mais je m'aperçois que l'exercice est bien plus dur que de décrire les chutes de moral.
Pourquoi je vais bien depuis quelques semaines ? Pourquoi ça n'arrive que maintenant ? Pourquoi ai-je autant besoin de sentir la présence de mes amis ? Comment suis-je si sûre d'avoir atteint un calme véritable, moi qui suis si anxieuse ?
C'est infiniment plus difficile d'analyser ce qui va bien que ce qui ne va pas.

Mais une chose est sûre : là, en ce moment-même, à l'instant où j'écris, je peux affirmer que je ressens physiquement cette plénitude, pour la première fois depuis.. Depuis un an et demi.
Il en aura fallu du temps et de la violence, des combats contre des moulins, des nuits blanches, des pages noircies, des petites luttes de tous les jours, pour en arriver là.
Je suis toujours un peu une étrangère à moi-même. Mais une étrangère qui va bien.